Nadaillac Justin MARJARIE Mort pour la France

Nadaillac-le-Sec, charmant village du Périgord Noir, à la limite du Lot et de la Corrèze. Commune la plus à l’est du département, elle est à 30 kilomètres de Sarlat et dépend du canton de Terrasson-Lavilledieu.


Trente-quatre poilus sont quotidiennement mis à l’honneur car ils sont inscrits sur le monument aux Morts, ou sur la plaque commémorative de l'église. Tous, cependant, ne sont pas nés à Nadaillac, mais avaient un lien avec le village de par leur famille qui y vivait par exemple. En revanche, 7 autres sont des Nadaillacois ne figurant pas sur les éléments de souvenir. Ce sont donc 41 soldats que Nadaillac a perdus durant la Première Guerre mondiale, dès les premiers jours du conflit, et dont le nom ou/et le prénom gravés sur le Monument aux Morts ou sur la plaque commémorative de l'église sont erronés pour certains !!!

L’exploration des documents mis à disposition pour chaque soldat m’a permis de faire une synthèse de la situation de ces individus. Pour cela, j’ai recherché les actes de naissance, les fiches matricules, les fiches individuelles de décès, les mentions des Livre d'Or, les transcriptions de décès, les renseignements fournis par MémorialGenWeb et également les recensements de population.

Quelques chiffres concernant ces soldats : - 35 sont nés à Nadaillac, 6 autres dans des communes de la Dordogne (Archignac), de la Corrèze (Estivals et Vars-sur-Roseix), du Lot (Cuzance) ou de Seine-et-Marne (Champs-sur-Marne). - Parmi eux, 36 sont décédés en France : 7 dans l’Aisne 02, 3 dans les Ardennes 08, 1 en Loire-Atlantique, 10 dans la Marne 51, 4 dans la Meuse 55, 3 dans l’Oise 60, 4 dans le Pas-de-Calais 62, 1 à Paris 75, 3 dans la Somme 80. Et enfin, 5 à l'étranger : 3 en Belgique, 1 en Allemagne et 1 en Macédoine (Serbie). La plupart de ces soldats ont été tués à l'ennemi ou sont morts des suites des blessures de guerre. - Concernant leur parcours militaire, peu de gradés. Beaucoup de soldats de 2eme classe, quelques soldats de 1ère classe, 4 sergents et 2 caporaux. On trouve également 2 canonniers, 1 clairon et 1 tambour. Une majorité ont obtenu leur certificat de bonne conduite.

- 24 sont partis le premier mois du conflit, dont 15 présents au corps dès les trois premiers jours (2, 3 et 4 août 1914). Au total, 30 partiront combattre en 1914, 5 en 1915, 4 en 1916. Pas de départs postérieurs. L’âge au départ pour le front varie de 18 à 36 ans. Environ la moitié des soldats est âgée de 18 à 25 ans, l’autre moitié de 26 à 40 ans. 4 soldats sont décédés dès le premier mois du conflit et n’ont combattu qu’une vingtaine de jours, tandis que 3 ont combattu plus de 4 ans. 36 soldats appartenaient à des régiments d’Infanterie ; c’est l’arme qui a payé le plus lourd tribut à l’hécatombe, arme de paysans par excellence, essentiellement recrutés dans les campagnes. 2 soldats servaient dans l’Artillerie de campagne, 1 chez les Zouaves et 1 chez les Chasseurs. Il faut également mentionner un combattant de l’Infanterie Coloniale qui a été envoyé en Macédoine et un soldat qui est resté en captivité en Allemagne. À leur départ pour le front, 14 au moins d'entre eux étaient mariés. 27 résidaient en Dordogne (24) : 21 à Nadaillac, 1 à Archignac, 1 à Bergerac, 1 à Chavagnac, 1 à Saint-Amand-de-Coly, 1 à Sainte-Nathalène et 1 à Sarrazac. 3 habitaient dans le Lot (46), 2 à Gignac et 1 à Gramat. 1 dans le Pas-de-Calais (62) à Boulogne-sur-Mer, 1 dans l’Ain (01) à Pougny, 1 en Gironde (33), à Libourne. Enfin, 7 vivaient à Paris. Manque l’information pour 1 soldat.

Il y a 100 ans, les soldats étaient beaucoup moins grands qu’aujourd’hui ; le plus petit d’entre eux mesurait 1m52 et les plus grands, ils sont 2, atteignaient 1m74 ! 24 mesuraient moins d’1m65, la moyenne était d’1m63. Rappelons que jusqu’à la loi du 2 avril 1901, la taille minimale d’1m54 était exigée, en deçà de laquelle l’homme n’accomplissait pas de service. Leur degré d'instruction n’est pas toujours mentionné, mais l’on sait que 2 d’entre eux n’avaient reçu aucune instruction (0), qu’un soldat ne savait que lire, tandis que 2 autres savaient lire et écrire. Enfin, 21 avaient reçu une instruction primaire, sans précision d’obtention du Certificat d’Études Primaires. Ils exerçaient des métiers divers : 18 cultivateurs, 3 charpentiers, 6 garçons de café, 2 domestiques, 4 maçons, 1 sellier, 1 maréchal-ferrant, 1 garçon boucher, 1 cordonnier, 1 boulanger, 3 dont on ignore la profession. Il est intéressant de noter que 21 au moins avaient repris la profession de leur père. Mais l’installation de certains à Paris fait apparaître une profession nouvelle par rapport à la génération précédente : celle de garçon de café, exercée par 1/7 des soldats de Nadaillac Morts pour la France.

Parmi les mères des soldats, à la naissance de ces derniers, on notera qu’il y avait 1 modiste, 1 sage-femme, 3 couturières. Une activité professionnelle surprenante pour l’époque est celle de chocolatiers, exercée par un couple, déjà installé en région parisienne, dont les époux avaient auparavant été respectivement domestique et cuisinière en Corrèze. Durant la guerre, les soldats étaient en général inhumés sur place. Le Général Joffre avait donné des consignes pour des inhumations en fosses communes. Mais sous la pression sociale, la tombe individuelle s’est rapidement imposée. Le fait a été enregistré en France par la loi du 29 décembre 1915. Des carrés militaires ont alors été aménagés dans les cimetières des communes proches du front, mais les aménagements restaient très sommaires. La décision fut alors prise de créer des nécropoles nationales pour regrouper les corps des combattants « Morts pour la France », avec des sépultures perpétuelles entretenues aux frais de l’état. Une loi de juillet 1920 a cependant autorisé la restitution des corps aux familles qui le demandaient, pour une inhumation dans les caveaux de famille. Mais ce ne fut le cas que pour 30 % des corps identifiés. On constate ici qu’au moins 17 des soldats ont été inhumés sur place, les listes sont actuellement en cours d’élaboration. Enfin, à titre posthume, ces soldats de la Grande Guerre ont parfois reçu des médailles, des récompenses ou des citations. Ainsi, à Nadaillac, 18 Poilus ont été décorés de la Médaille Militaire (10) ou de la Croix de Guerre (9).

Parmi eux, l’arrière-grand-père de mon conjoint.
Justin MARJARIE est né le 11/04/1878 à Nadaillac en Dordogne (24). Il est décédé le 09/06/1918 à Vrigny dans le département de la Marne (51), plus précisément au Bois de Vrigny, tué à l'ennemi, à 6 heures du matin, comme le précise la Transcription de décès. À sa naissance, son père MARJARY Jean, 50 ans, déclare ne pas savoir signer. Il exerce la profession de cultivateur et sa mère, LEONARD Françoise, 32 ans, celle de cultivatrice. Ils sont domiciliés à Nadaillac, au lieu-dit "Le Bourg".

Justin est de la classe 1898 et a été recruté sous le numéro 1125 à Bergerac. Il est classé dans la 2ème partie de la liste du recrutement cantonal, mais il est précisé « Propre au service » et, selon l’article 21, qu’il est aîné de septuagénaire. Sa feuille d’incorporation indique que ses cheveux et ses sourcils sont noirs, ses yeux noirs, son front est couvert, son nez et sa bouche sont moyens, son menton est court et son visage rond. Il mesure 1 mètre 62. Son degré d’instruction est mentionné par le chiffre 0, il ne sait donc ni lire, ni écrire. Justin MARJARIE travaille lui-même comme cultivateur et réside à Nadaillac, avec son père (sa mère étant décédée en 1887), lorsqu'il est appelé pour le service militaire, le 04/11/1899, au 108ème Régiment d’Infanterie de Ligne. Soldat de 2ème Classe, il passe dans la disponibilité de l’armée active le 22/09/1900, puis dans la réserve de l’armée active le 01/09/1902. Le certificat de bonne conduite lui a été accordé. Le 05/07/1901, Justin MARJARIE épouse Marie DUPEYROU à Nadaillac (24). Le père de ce dernier est décédé un an plus tôt. La fiche matricule mentionne que, le 06/11/1904, Justin réside à Saint-Michel-de-Fronsac (33). Du 21/08/1905 au 17/09/1905, il accomplit une première période d’exercices dans le 108ème Régiment d’Infanterie. Le 10/09/1906, il vit à Libourne (33). Le 27/02/1909, il demeure 4, cours des Girondins, à Libourne (33). On ignore le métier qu’il y exerce. Il accomplit une seconde période d’exercices, du 25/03/1909 au 10/04/1909, toujours au 108ème Régiment d’Infanterie.

Par décret de mobilisation générale, Justin est rappelé à l’activité le 01/08/1914 ; il arrive au corps le 13/08/1914. Il changera successivement de régiments : le 14/03/1915, pour le 93ème Régiment Territorial d’Infanterie et le 31/05/1917, pour le 99ème Régiment d’Infanterie. C’est au sein de ce Régiment, 1er Bataillon, 3ème Compagnie, qu’il sera tué. Il fait donc campagne contre l’Allemagne du 13/08/1914 au 09/06/1918, soit 3 ans 9 mois et 27 jours. Il est inhumé à la Nécropole Nationale « La Maison Bleue », à Cormicy dans la Marne (51), tombe individuelle 6357. Un secours immédiat de 150 francs est alloué par le 99ème Régiment d’Infanterie, le 12/02/1919, à sa veuve, Madame MARJARY, demeurant à Paris, 15ème.

Le jugement a été transcrit le 26/11/1919 à Libourne, son dernier lieu de résidence, où la transcription de décès a d’ailleurs été établie. C’est sur le Monument aux Morts de cette ville que son nom figure ainsi que sur la liste de la Nécropole de Cormicy. Aucun souvenir de lui à Nadaillac… Et pourtant !!! Pas même une photographie !

Nous nous sommes donc rendus à Vrigny, sur les lieux du combat et à Cormicy où nous avons pu nous recueillir.

Par Michèle POINTEAU-MARY.

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